Puis-je reprendre travail avant fin mon arrêt maladie ?
La situation de l’employé entre la fin de l’arrêt de travail et l’examen médical de récupération
Tant que le bilan médical n’a pas eu lieu, suite à un congé de maladie de plus de 30 jours, l’employé n’est pas tenu de retourner à son poste. Le contrat de travail reste suspendu (Cass. Soc. 22.02.2017 : n°15-22378).
Cette décision a été prise conformément aux dispositions en vigueur avant la loi sur le travail du 8 août 2016.
La reconnaissance de l’incapacité d’un salarié : l’observation par le médecin du travail
- Régime antérieur à la Loi sur le travail
L’incapacité physique d’un salarié à travailler doit être constatée par le médecin du travail (Cass. soc. 28 juin 2006, n° 04-47672). La reconnaissance de l’incapacité d’un salarié dans son travail peut avoir lieu à l’occasion de toute visite médicale obligatoire :
- le l’examen médical de l’emploi ;
- la visite de retour après un arrêt de travail de plus de 30 jours en principe ;
- la visite à la demande du salarié (Cass. soc. 08.04.2010, n°09-40975) ;
- ou la surveillance générale des employés organisée par le employeur (Cass. soc. 16.05.2000, n°97-42410
)
La reconnaissance de l’incapacité d’un salarié dans son travail ne peut, en principe, être établie que :
- après une étude du lieu de travail et des conditions de travail dans l’entreprise ;
- après avoir effectué deux examens médicaux de la personne concernée, espacés de 2 semaines et accompagnés, le cas échéant, des examens supplémentaires prévus dans ce cas.
Le délai de 2 semaines est un délai minimum : le non-respect de ce délai annule le licenciement prononcé en raison de l’état de santé du salarié (Cass. soc. 27.05.2009, n°08-41010). Un une procédure accélérée existait avant la loi sur le travail. En effet, conformément à l’article R 4624-31 du Code du travail (ancien article), l’incapacité du salarié peut être déclarée dès le premier examen médical :
- lorsque le maintien de l’employé sur son lieu de travail présente un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité ou celle de tiers ;
- lorsqu’un examen préalable à la reprise a eu lieu dans un délai ne dépassant pas 30 jours.
L’avis doit, dans ce cas, indiquer soit la situation de danger immédiat, soit qu’une seule visite est effectuée conformément à l’article R. 4624-31 du Code du travail (Cass. soc. 21.05.2008, n°07-41380).
- Régime applicable depuis la loi sur le travail (loi 2016-1088 du 8 août 2016, art. 102-V, JO du 9 ; décret 2016-1908 du 27 décembre 2016, JO du 29).
L’incapacité physique d’un employé pour son travail doit toujours être vérifiée par le médecin du travail, qui est la seule personne autorisée à prendre une décision.
Depuis le 1er janvier 2017, le médecin du travail doit, avant de déclarer un salarié inapte, avoir effectué (ou fait effectuer par l’équipe multidisciplinaire) un examen médical accompagné, si nécessaire, d’examens complémentaires (article L 4624-4 du Code du travail). Si, toutefois, elle estime qu’un deuxième examen est nécessaire pour recueillir les raisons de sa décision, il doit avoir lieu dans les 15 jours suivant le premier examen (article R 4624-42 du Code du travail).
Avant de donner son avis, le médecin du travail peut consulter l’inspecteur du travail (voir section R 4624-43). Le médecin du travail doit, avant de constater l’incapacité du salarié, effectuer ou faire effectuer par un membre de l’équipe multidisciplinaire (cf. article trav. R4624-42) :
- une étude de la position de l’employé qu’il a l’intention de conclure à une incapacité physique ;
- une étude des conditions de travail dans l’établissement et indiquer la date à laquelle le dossier de l’entreprise a été mis à jour.
Depuis le 1er janvier 2017, la constatation de l’incapacité physique du salarié nécessite des échanges préalables entre le médecin du travail et le salarié d’une part, et le médecin et l’employeur d’autre part. Le but de ces échanges avec l’employeur et le salarié est de permettre à chacun de commenter les avis et les propositions que le médecin du travail entend leur envoyer à la fin de la procédure (voir section R 4624-42).
Le médecin du travail doit rédiger un avis d’incapacité accompagné de ses conclusions écrites, accompagné d’indications quant au reclassement du salarié. Un médecin du travail qui estime qu’aucun aménagement, adaptation ou transformation du poste de travail occupé n’est possible et que le l’état de santé du travailleur justifie qu’un changement de position déclare le travailleur inapte à son poste de travail (article L4624-4).
Le médecin du travail peut également mentionner dans l’avis médical d’incapacité que tout maintien du salarié dans un emploi peut être gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié entrave toute reclassification à un emploi, exemptant ainsi l’employeur de toute recherche d’emploi (voir section OU 4624-42).
Enfin, le médecin du travail doit transmettre l’avis d’incapacité au salarié et à l’employeur par tout moyen lui donnant une certaine date . L’employeur doit l’archiver afin qu’il puisse être soumis à tout moment à la demande de l’inspecteur du travail et de l’inspecteur du travail. Une copie de l’avis doit être incluse dans le dossier médical de santé au travail du salarié concerné (article R 4624-55 du Code du travail).
L’organisation de l’examen médical pour
récupération Un bilan médical est obligatoire après une absence d’au moins 30 jours (ancien article R4624-24 du Code du travail) :
- en raison d’un accident du travail,
- d’une maladie ou d’un accident non professionnel.
Pour mémoire, rappelons que pour la durée de l’arrêt de travail, le contrat de travail du salarié est suspendu. Tant que le bilan médical n’a pas lieu, le contrat de travail reste suspendu. C’est cet examen de reprise qui met fin à la suspension du contrat de travail, même si elle ne coïncide pas avec le retour au poste d’employé.
L’examen médical de reprise a lieu au retour au travail et au plus tard dans les 8 jours (ancien article R 4624-22 du Code du travail). Dès que l’employeur prend connaissance de la date de fin de l’arrêt de travail, il doit saisir le service de santé au travail afin que l’examen médical puisse être organisé dans les 8 jours suivant la prise de contrôle par un employé.
Lorsque l’employeur n’organise pas l’examen médical de récupération dans ce délai de 8 jours, ce délai donne droit à des dommages-intérêts pour le salarié (Cass. Soc. 15.04.2015 : n°13-21533). L’employeur ne peut être sanctionné si l’appel à l’examen médical est en retard et que ce retard résulte du service de santé au travail.
Le sort de l’employé entre la fin de l’arrêt de travail et l’examen médical de récupération
L’examen médical peut avoir lieu quelques jours après le retour du salarié puisqu’il doit avoir lieu pendant la convalescence et au maximum dans les 8 jours. Cela pose le problème du sort et du statut du salarié entre la fin de son arrêt de travail et l’examen médical de reprise. Légalement, il est censé reprendre le travail, mais son contrat reste suspendu jusqu’à cet examen médical.
Deux cas peuvent survenir :
- La reprise du travail et le faute de l’employé
Si le salarié revient à son poste en attendant l’examen médical de reprise, il est à nouveau soumis à un pouvoir disciplinaire, même avec la suspension du contrat de travail, mais uniquement pendant la période de 8 jours au cours de laquelle l’examen médical peut être organisé. S’il commet une faute pendant ces 8 jours, il peut être sanctionné (Cass. Soc. 17.10.2012 : n°11-22287).
- Pas de retour au travail après la fin du congé de maladie
L’absence du salarié entre la fin de son arrêt de travail et l’examen médical de récupération n’est pas en soi fautive, dans la mesure où le contrat est toujours suspendu jusqu’à cet examen médical (Cass. Soc. 21.05. 2008:07-41102 ; 16.06.2009 : n°08-41519).
Cette solution repose sur le principe de l’obligation de sécurité pour l’employeur, qui ne peut pas faire travailler un salarié sans savoir s’il est apte ou non au travail. C’est cette solution ce qui est confirmé par un arrêt du 22 février 2017 (Cass. soc. 22.02.2017 : n°15-22378).
Dans ce cas, un employé occupant le poste de directeur de magasin a été plusieurs fois en arrêt de travail pour cause de maladie. Chaque fois que nous revenions à la poste, un examen médical était organisé. Sauf lors de son dernier arrêt de travail de plus de 30 jours. À la fin de son congé de maladie, l’employeur n’avait pas organisé d’examen médical. L’employé ne s’est pas présenté au travail. L’employeur a déduit une absence injustifiée injustifiée et a ordonné son congédiement pour faute grave. L’employée a contesté son congédiement, entre autres griefs. Elle a été congédiée par les juges du procès qui ont estimé que son absence était fautive, malgré l’absence d’un examen médical pour se rétablir. La Cour de cassation n’est pas d’accord avec cet avis et rompt l’arrêt en appel.
La Cour de cassation affirme que le contrat de travail reste suspendu en l’absence d’organisation d’un une visite de récupération et un avis sur l’aptitude du médecin du travail au travail. À partir de ce moment-là, l’employé n’était plus obligé de se présenter au travail. Le fait de ne pas retourner au travail ne peut être considéré comme une absence injustifiée et ne peut constituer une faute grave.
En conclusion, tant que l’examen médical de récupération n’a pas eu lieu, le salarié n’est pas obligé de se rendre au travail, son absence n’est pas fautive.
Sources :
Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 22 février 2017 : RG n°15-22378
Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 8 avril 2010 : n°09-40975
Cour de cassation, Chambre sociale, arrêt du 16 mai 2000 : n°97-42410
Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 27 mai 2009 : n°08-41010
Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 21 mai 2008 : n°07-41380
Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 15 avril 2015 : n°13-21533
Cour de Cassation, chambre sociale, arrêt du 17 octobre 2012 : n°11-22287
Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 21 mai 2008 : n°07-41102
Cour de cassation, chambre sociale, arrêt du 16 juin 2009 : n°08-4519